Projet conventionnel : pourquoi nous n'avons pas signé

Les négociations conventionnelles se sont achevées ce mardi 28 février sur un échec : aucun des six syndicats de médecins représentatifs n’a signé la convention.
Bertrand de Rochambeau, Président du SYNGOF, co-Président d’AVENIR SPÉ – LE BLOC, premier syndicat de spécialistes, nous en expose les raisons.

S : En marge des points de blocage qui aboutissent à l’échec des négociations conventionnelles avec la CNAM, peut-on retenir quelques avancées ? 

BdR : en effet. Parmi les principales avancées qui nous concernent, nous retiendrons une majoration de 1,50 euros pour les consultations, ce qui ne couvre toutefois pas l’inflation et l’augmentation des coûts depuis 2016. Pour les spécialistes acceptant de s’engager dans un « contrat d’engagement territorial », les consultations passent de 30 à 35 euros et l’Avis Ponctuel de Consultant (APC) passe de 55 à 60 euros. Nous avons par ailleurs obtenu une augmentation du modificateur K pour les actes chirurgicaux de 10%. En revanche, nous avions demandé une augmentation des tarifs de la CCAM au titre de l’augmentation du coût de l’énergie mais nous n’avons obtenu qu’une augmentation de 1 centime du point travail.

Le SYNGOF portait la proposition de cumul Consultation + Echographie : nos arguments de pertinence ont été entendus, nous avons obtenu que toutes les échographies de grossesse puissent être accompagnées d’un supplément de 15 euros quand elles sont effectuées par un-e gynécologue médical-e ou un-e gynécologue obstétricien-ne hors hospitalisation.

La même augmentation est attribuée aux échographies gynécologiques les plus fréquemment effectuées. La pose, dépose ou le changement du stérilet peut aussi bénéficier d’un supplément de 15 euros. C’est la même construction de tarif que pour ce qui avait été obtenu pour la colposcopie lors de l’avenant 9. Ce qui permet à la CNAM de ne pas enfreindre la règle de non-cumul NGAP et CCAM qui reste un totem et de ne pas indexer le tarif sur une éventuelle hausse du CS.

S : La défense du secteur 2 constituait un des principaux points d’achoppement pour ces négociations ?

BdR : avec LE BLOC, nous défendions en effet l’accès au secteur 2 pour les plus jeunes car nous nous souciions de l’arrivée des nouveaux confrères qui sortent de l’internat. Sur ce point, le texte proposé apporte une clarification : sont mentionnés le Dr Junior ainsi qu’une année supplémentaire (même si c’est une demi-année de chef de clinique qui ne valide pas le titre d’ancien chef de clinique). Une année d’assistanat suffit également pour valider l’entrée en secteur 2.

S : L’autre condition sine qua non d’une signature était la renégociation complète de l’Optam et Optam-Co ?

BdR :  toujours avec LE BLOC, nous avions porté l’Optam lors des négociations de 2016 avec une philosophie et des limites d’engagement.  Il n’était pas question de reprendre le même système en gardant les années de référence 2013-14-15.

Aussi, nous avons demandé que les règles tarifaires soient totalement revues à hauteur de la moyenne des honoraires observés en secteur 2 au niveau national et qu’il y ait un plancher de prise en charge par les assureurs complémentaires au-delà du remboursement de l’Assurance Maladie.

Mais le directeur général de la CNAM n’a pas voulu revenir sur les dates de référence d’engagement : les taux d’engagement restent dans le texte actuel ceux de 2013, 2014 et 2015. Avec le principe maintenu que l’on ne peut reporter que la moitié de l’augmentation du tarif opposable dans nos honoraires totaux, ce qui fait baisser les dépassements de moitié. En l’état, cet effet cliquet prolongé 10 ans vide le secteur 2 de sa liberté tarifaire, ce qui n’est pas recevable.

S : Quelle consigne donne le SYNGOF pour les médecins qui envisageait de sortir de l’Optam ?

BdR : se maintenir dans l’Optam dans les conditions actuelles présente un danger. Nous conseillons à tous ceux qui sont en difficulté pour tenir les objectifs de l’Optam, de ne plus les respecter. Pour ceux qui recevraient des courriers de relances de la Caisse sous peine d’être exclus de l’Optam, nous leur conseillons de sortir de l’Optam avant que ce soit la Caisse qui procède à leur exclusion car dans ce cas elle est en droit de leur réclamer les indus sur la dernière année, ce qu’elle ne peut pas faire si c’est le médecin qui décide lui-même de sortir de l’Optam.

J’apporte une nuance néanmoins  pour les jeunes qui s’installent et qui souhaiteraient signer l’Optam : ils s’engagent sur des taux régionaux.  Nous avons obtenu, dans le texte final, un coup de pouce pour les régions où les taux de dépassement sont les plus bas. Pour les régions aux dépassements les plus faibles, nous avons fait augmenter de 10% le taux d’engagement. En échange, les jeunes qui s’installent dans les régions qui font le plus de dépassements, auront un taux d’engagement moyen minoré de – 5%. La non signature ne permettra pas pour l’instant d’appliquer cette modification destinée à rendre attractif l’option dès les premières années. Les taux de groupe ont aussi été maintenus.

S : Pourquoi n’avons-nous pas signé avec ce qui constitue des avancées ?

BdR : l’engagement territorial tel que demandé par le texte, malgré des assouplissements obtenus par rapport à la demande initiale, exclut de fait 60% des médecins spécialistes. Cette frange est donc incitée à travailler plus pour bénéficier des revalorisations tarifaires proposées. Ce qui a été jugé par toutes les spécialités comme impossible à accepter. Pour notre part nous n’avons pas apprécié d’être exclus du dispositif des assistants médicaux, alors que la demande de la caisse est de consulter davantage. Mais aussi que l’on demande à ceux arrivés à l’âge de la retraite d’en faire encore plus et qu’il soit imposé aux médecins en secteur 2, 40% d’actes à tarif opposable minimum pour que leurs patientes bénéficient des tarifs de remboursements bonifiés.

S : Les négociations conventionnelles n’ayant pas abouti aux signatures nécessaires pour valider la convention, nous nous dirigeons donc vers un arbitrage ?

BdR : tout à fait. C’est Annick Morel, inspectrice générale des affaires sociales, qui a été désignée par le gouvernement et acceptée par les parties pour établir un règlement arbitral dans les trois mois qui viennent. Elle consultera les syndicats pendant cette période et nous réaffirmerons nos positions. Durant ces trois mois, nous restons dans la convention précédente. Ensuite il y aura 2 ans pour signer une nouvelle convention.

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