L’équipe de soins spécialisés (ESS) : nouvelle organisation légitime ou usine à gaz supplémentaire ?

Article du Dr Philippe MIRONNEAU, Gynécologue obstétricien à Dijon 

Dernière-née des organisations territoriales, après les ESP, les MSP, les SAS, les CPTS, voici donc venu le temps des ESS – Equipe de Soins Spécialisés.

La notion d’ESS est apparue dans la loi N° 2019-774 du 24 juillet 2019, relative à l’organisation et à la transformation du système de santé, pour encourager le regroupement des spécialistes et pouvoir organiser la médecine spécialisée notamment en ambulatoire sur les territoires en fonction des besoins des patients.

L’article L. 1411-11-1 du Code de la Santé Publique définit ainsi une ESS :

« Une équipe de soins spécialisés est un ensemble de professionnels de santé constitué autour de médecins spécialistes d’une ou plusieurs spécialités hors médecine générale, choisissant d’assurer leurs activités de soins de façon coordonnée avec l’ensemble des acteurs d’un territoire, dont les équipes de soins primaires, sur la base d’un projet de santé qu’ils élaborent entre eux. L’équipe de soins spécialisés contribue avec les acteurs des soins de premier recours à la structuration des parcours de santé ».

A la demande de nos ARS, il s’agit de mettre en place des groupes de spécialistes exerçant à priori dans la même spécialité pour assurer le parcours de soin des patients situés dans nos déserts médicaux et afin de leur assurer une prise en charge rapide et optimale.

Les ESS se positionnent donc comme des interlocuteurs privilégiés des CPTS, mais également d’autres structures partenaires comme les MSP, ESP, DAC et des établissements de santé.

Evidemment, il s’agit encore d’une usine à gaz supplémentaire.

Peu d’expérimentations à ce jour
L’avenant 2 à la convention médicale du 22 décembre 2021 a lancé officiellement l’expérimentation autour des ESS.

Pour l’instant très peu d’ESS ont été mises en place. Parmi celles déployées, on recense une ESS de dermatologie, d’ophtalmologie et de rhumatologie. Mais manifestement ce que veulent les ARS ce sont des ESS qui gèrent l’ensemble de la pathologie de la spécialité.

Il y a eu quelques demandes d’ESS déjà en gynécologie mais qui à ma connaissance ont toutes été récusées. Il s’agit en général d’ESS  sur un parcours bien spécifique d’endométriose, de cancer du sein, de stérilité. Or, il me semble que nous avons déjà ce genre de parcours bien organisé avec des centres de référence qui généralement intègrent en plus les centre hospitaliers universitaires. C’est pourquoi je crains qu’il soit difficile de mettre en place des ESS dans notre spécialité.

Il en est de même pour l’obstétrique. Nous travaillons tous en réseau, avec des systèmes de mutation et de transfert dans les centres agréés de périnatalogie.

L’autre problème sera bien sûr le financement de ces ESS
Le budget qui a été prévu devrait permettre la constitution et le financement d’une centaine d’ESS en France, avec un budget au démarrage de 40 000 euros et un budget de fonctionnement entre 50 000 et 100 000 euros, qui dépendra de leur dimensionnement. Celui-ci  s’effectuant en fonction des territoires et du nombre de spécialistes et autres professionnels de santé impliqués et des partenariats avec les différentes structures ou organisations territoriales.

Pour l’instant les rares ESS autorisées sont financées par des fonds FIR. Il semble qu’au terme de la convention actuellement en discussion, il pourrait y avoir d’autres modalités  de financement.

Quoi qu’il en soit, les URPS et la CN URPS ont beaucoup travaillé sur ses ESS.

Vous pouvez sans problème retrouver de nombreux éléments concernant les statuts de ces ESS et les modalités de constitution.

Maître CORMIER a par ailleurs fait tout un travail sur les modalités juridiques, que nous pourrons vous partager prochainement. Toutefois le plus simple est de monter ces ESS sous forme d’une association 1901.

Voilà donc un sujet de réflexion supplémentaire pour les mois à venir.

Source documentaire : CN URPS ML

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